Revers procĂ©dural pour Nicolas Sarkozy: par des dĂ©cisions de janvier et de ce mercredi, la Cour de cassation a Ă©cartĂ© tous les recours de l'ex-chef de l'Etat et de son camp contre l'enquĂȘte sur les soupçons de financement libyen de sa campagne prĂ©sidentielle 2007.
Dans un arrĂȘt rendu mercredi, la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire français a confirmĂ© la constitution de partie civile de l'association anti-corruption Sherpa, qui lui confĂšre accĂšs au dossier d'enquĂȘte et la possibilitĂ© de demander des actes.
Cette dĂ©cision est venue s'ajouter Ă des ordonnances, qui n'avaient pas Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©es jusque-lĂ , prononçant le 18 janvier la non-admission des autres pourvois de M. Sarkozy, de ses lieutenants Claude GuĂ©ant et Eric Woerth, et de l'intermĂ©diaire Alexandre Djouhri. "Ni l'intĂ©rĂȘt de l'ordre public, ni celui d'une bonne administration de la justice ne commandent l'examen immĂ©diat du pourvoi" et la "procĂ©dure sera continuĂ©e conformĂ©ment Ă la loi", indiquent les ordonnances du 18 janvier du prĂ©sident de la chambre criminelle de la Cour de cassation, consultĂ©es par l'AFP.
Selon plusieurs avocats au dossier interrogĂ©s par l'AFP, cette dĂ©cision signifie que ces questions procĂ©durales ne pourraient ĂȘtre dĂ©sormais examinĂ©es qu'Ă l'issue d'un Ă©ventuel procĂšs.
Par cet arrĂȘt et ces ordonnances, la Cour de cassation valide ainsi, au moins temporairement, les investigations des juges Aude Buresi et Marc Sommerer dans cette affaire aux multiples ramifications.
Le camp Sarkozy tempĂȘtait contre le rejet, en septembre 2020 par la cour d'appel de Paris, de toute une sĂ©rie de nullitĂ©s soulevĂ©es contre cette enquĂȘte sur les soupçons de financement libyen de la campagne prĂ©sidentielle victorieuse en 2007. Elle vaut notamment Ă l'ex-chef de l'Etat une mise en examen pour "corruption passive", "financement illĂ©gal de campagne Ă©lectorale", "recel de fonds publics libyens" et "association de malfaiteurs". Parmi les motifs de nullitĂ© invoquĂ©s, Nicolas Sarkozy avait avancĂ© l'immunitĂ© prĂ©sidentielle.
-Tentaculaire-
Pour les faits antĂ©rieurs Ă son Ă©lection, alors qu'il Ă©tait ministre de l'IntĂ©rieur, l'ex-chef de lâĂtat demandait aussi que l'affaire soit confiĂ©e Ă la Cour de Justice de la RĂ©publique, seule habilitĂ©e Ă juger les membres de gouvernement pour l'exercice de leurs fonctions. Avec M. GuĂ©ant, ils faisaient en outre valoir que la loi ne prĂ©voyait pas de poursuites pour le dĂ©tournement des fonds publics d'un pays Ă©tranger.
Dans ses arrĂȘts de septembre 2020, la cour d'appel de Paris avait seulement annulĂ© partiellement un des motifs de mise en examen de Nicolas Sarkozy, pour violation du code Ă©lectoral, validant le reste des investigations.
Sollicités, ni Me Thierry Herzog, avocat habituel de M. Sarkozy, ni Me Emmanuel Piwnica, son avocat au conseil, n'ont souhaité s'exprimer sur la non-admission en janvier des pourvois de leur client. "Je ne puis que regretter cette décision, qui ne change toutefois rien au fond", a seulement indiqué Me Piwnica concernant la confirmation mercredi de la constitution de partie civile de Sherpa.
"La défense de Nicolas Sarkozy fait feu de tous bois, et c'est son droit, mais les arguties juridiques du pourvoi ont logiquement été balayées par la Cour de cassation", s'est au contraire félicité l'avocat de Sherpa, Me Vincent Brengarth.
Cette retentissante enquĂȘte avait Ă©tĂ© ouverte aprĂšs la publication par Mediapart en 2012, dans l'entre-deux tours de la prĂ©sidentielle, d'un document censĂ© prouver que la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy avait Ă©tĂ© financĂ©e par le rĂ©gime de Mouammar Kadhafi.
Témoignages de dignitaires libyens, notes des services secrets de Tripoli, accusations d'un intermédiaire... En neuf ans de travail, les magistrats ont réuni une somme d'indices troublants qui ont donné corps à cette thÚse.
Toutefois, aucune preuve matĂ©rielle n'a pour l'heure Ă©tĂ© retrouvĂ©e, mĂȘme si des mouvements de fonds suspects ont conduit Ă une dizaine de mises en examen Ă ce jour dans le volet principal.
Cette enquĂȘte dĂ©jĂ tentaculaire s'est enrichie en 2021 de nouveaux volets Ă©pais : d'autres juges d'instruction enquĂȘtent dĂ©sormais sur une possible tentative de subornation du sulfureux intermĂ©diaire Ziad Takieddine, qui a temporairement retirĂ© fin 2020 ses accusations contre Nicolas Sarkozy.
Ce volet, dans lequel une demi-douzaine de personnes ont été mises en examen, implique la "reine des paparazzis" Mimi Marchand, une proche des couples Sarkozy et Macron.
Les juges enquĂȘtent aussi sur une tentative de corruption de magistrats libanais qui aurait visĂ© Ă faire sortir de dĂ©tention Hannibal Kadhafi, fils de l'ancien dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, dans l'espoir de dĂ©douaner Nicolas Sarkozy.
AFP



