L'été joue les prolongations

Face au réchauffement climatique, La Réunion suffoque (presque)

  • Publié le 20 avril 2023 à 10:14

Vous ressentez un sentiment de chaleur étouffante et d'humidité en ce mois d'avril… C'est tout à fait normal. Du moins, presque. Si cette sensation est normale, c'est en raison des températures à un niveau plus élevé que la normale en cette période. Là où ce n'est pas normal, c'est qu'à l'aube de l'hiver austral, et à l'aube des années à venir, les températures seront de plus en plus en hausse (Photo rb/www.imazpress.com)

Pour ce mois d'avril, les températures sur les cartes météo sont au-dessus des normales de saison. À la station de Gillot-Aéroport, "la moyenne des températures du 1er au 16 avril a été de 27,2° degrés", explique François Bonnardot, responsable climatologie à Météo France Réunion. "C'est la deuxième température plus élevée depuis le début des mesures en 1953, seulement dépassée par la fameuse année 2019 avec 27,8° degrés sur la même période", ajoute le prévisionniste.

Le lundi 17 avril, c'est au Port que les températures ont affolé le thermomètre. La station a enregistré une température de 35,2 degrés. "Ce qui constitue la deuxième température maximale quotidienne pour un mois d'avril, derrière les 36 degrés enregistrés le 8 avril 2003", précise le climatologue.

"Il s'agit aussi des 35 degrés les plus tardifs à la station. L'an dernier il avait fait 34,7 degrés le 24 avril", ajoute-t-il.

Il faut remonter à 2019 pour observer un tel niveau thermique en avril. En 2019, la station de la Pointe des Trois-Bassins avait observé plusieurs valeurs maxi au-dessus de 34°C, et ce jusqu'en deuxième quinzaine d'avril, dont 34.8°C le 19 avril.

La raison de ces températures excédentaires et difficilement supportables, "des masses d'air plus chaudes que la normale entretenue par des anomalies positives de température de surface de la mer dans la zone sud-ouest Océan Indien tropical", indique Météo France.

De plus, "les vents faibles favorisent des écarts thermiques plus marqués entre le jour et la nuit (nette rupture par rapport aux mois d'avril récents où l'alizé était très présent)".

Lire aussi - Des températures au dessus des normales depuis le début du mois d'avril

- Près de 2 degrés au-dessus des normales de saison -

La journée, la sensation d'étouffement et de chaleur est en tout cas bien présente. "Pour les températures maxi de la journée, on est même à un niveau record de 31,2 degrés, soit 1,6 de degrés en plus par rapport à la normale", explique François Bonnardot.

Dépassant celles de 2019 où il avait été enregistré 31 degrés sur la période de début avril.

Les températures minimales sont quant à elles "excédentaires mais moins que les maximales, d'où des amplitudes diurnes (quand les températures font le grand écart) au-dessus des normales".

Pour un début avril, il faut remonter à 1990 et 1989 pour retrouver un écart moyen entre température mini et maxi quotidien plus important à Gillot (amplitude proche de 8°C).

"On peut donc clairement dire que l'été joue les prolongations cette année avec un mois d'avril exceptionnellement chaud", note Météo France Réunion.

Malheureusement pour nous, cela ne devrait pas s'améliorer de sitôt. "Cette situation devrait perdurer encore jusqu'à la fin du mois", indique François Bonnardot.

Mais que l'on se rassure, "un retour progressif des alizés de saison pourrait intervenir à partir de la première semaine du mois de mai et favoriser ainsi une amorce de baisse des températures en lien avec l'entrée progressive en saison fraiche", souligne le responsable climatologie à Météo France.

- Les années les plus chaudes sont devant nous -

Une pointe de fraicheur à laquelle cependant les Français ne devraient pas trop s'habituer. Au fur et à mesure des années et avec le réchauffement climatique, le climat va de plus en plus être perturbé, les saisons se décaler.

D'ici les années à venir, à La Réunion, les températures devraient augmenter de près de deux degrés par rapport aux normales de saison, selon les scénarios climatiques régionalisés établis par Météo France dans le cadre du projet Drias (Donner accès aux scénarios climatiques régionalisés français pour l’impact et l’adaptation de nos sociétés et environnement).

Le scénario sur lequel ces prévisions sont basées est celui dans lequel le niveau d’émissions de gaz à effet de serre ne se stabiliserait qu’au milieu du siècle et diminuerait ensuite légèrement.

L'année 2022 a d'ailleurs été la plus chaude jamais enregistrée en France avec 14,5 degrés de température moyenne.Cette année "2022 se classe au premier rang" depuis le début des relevés en 1900, "très loin devant 2020, qui détenait jusqu'à présent le record", avec 14,07°C, selon l'organisme public.

Ce record est un "symptôme du changement climatique", soulignent les prévisionnistes.

Très chaude, l'année 2022 aura été également "exceptionnelle" au niveau de la sécheresse, selon Météo France, qui a enregistré un "déficit pluviométrique record" de quelque 25% depuis le début des relevés en 1959.

La Réunion n'a pas été épargnée par l'absence de pluie. Une absence toujours remarquée à l'heure actuelle, même si ces derniers jours, plusieurs vigilances fortes pluies et orages ont été mise en place.

Et si des internautes accusent Météo-France de surévaluer le réchauffement climatique dans l'Hexagone en utilisant un outil, l'indicateur thermique national, qui ne prendrait en compte que des relevés effectués dans des zones urbaines. Cet argument est trompeur, selon plusieurs climatologues interrogés par l'AFP. Cet indicateur n'est pas l'outil dont se servent les scientifiques pour estimer le changement climatique. Et s'il est vrai que le réchauffement est plus intense dans les zones urbaines que dans les zones rurales, celui-ci est observable aussi bien à la ville qu'à la campagne.

La France doit donc "sortir du déni "et se préparer à s'adapter à un réchauffement climatique qui puisse aller jusqu'à 4°C sur son territoire, a argumenté Christophe Béchu.

Lire aussi - À La Réunion, le dérèglement climatique accélère l'érosion

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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1 Commentaires
Didier
Didier
11 mois

400 000 véhicules à La Réunion - pas de transport en commun - des dizaines de milliers de voitures surpuissantes et de 4x4... et puis bien sûr la pollution industrielle mondiale !
Et on se demande encore ce qu'il faudrait faire pour diminuer le réchauffement climatique et ne plus suffoquer ?
Quelle hypocrisie générale !