L'amendement porté par le sénateur Stéphane Fouassin qui instaurerait une nouvelle taxation sur les alcools forts créé la discorde depuis plusieurs jours. Entre désir de protection de la filiÚre locale du rhum, et promotion de la santé publique, les avis divergent et divisent (Photo : www.imazpress.com)
Le projet de loi de finances 2026 n'en finit plus de diviser. Cette fois-ci, c'est un amendement visant la fiscalitĂ© des alcools forts qui provoquent une levĂ©e de bouclier.Â
"Cette mesure inquiĂšte fortement la filiĂšre industrielle du rhum Ă La RĂ©union, qui sâinscrit depuis deux siĂšcles dans le paysage Ă©conomique local, gĂ©nĂšre des emplois, crĂ©e de la valeur ajoutĂ©e pour le territoire et bĂ©nĂ©ficie, grĂące Ă lâexport et au spiritourisme, dâun rayonnement international notable", ont alertĂ© les principaux acteurs de la filiĂšre rhum, rĂ©uni sous le nom "La RĂ©union des Rhums".Â
DerriĂšre ce dispositif technique "se profile une dĂ©cision aux consĂ©quences importantes : lâinstauration dâune majoration locale de fiscalitĂ© sur certains alcools, touchant principalement le rhum", ont-ils soulignĂ©.Â
Or, "il sâagit dâun produit emblĂ©matique du territoire, Ă©laborĂ© et valorisĂ© par une filiĂšre industrielle et des TPE-PME locales qui font vivre des centaines de familles".
- La Région contre une nouvelle taxation sur les alcools forts -
Depuis, la prĂ©sidente de RĂ©gion Huguette Bello et la sĂ©natrice Evelyne CorbiĂšre Naminzo se sont positionnĂ©es en faveur du retrait de cet amendement, qui n'a pour l'heure pas Ă©tĂ© votĂ©.Â
Cet amendement "instaurerait une nouvelle taxation, au profit du DĂ©partement, qui pourrait atteindre 1615,72 euros par hectolitre dâalcool pur, soit une hausse de 1.200% par rapport Ă la fiscalitĂ© actuellement appliquĂ©e et une surtaxe potentielle de prĂšs de 8 euros par bouteille dâun litre", a pointĂ© Huguette Bello.
"Sous couvert, louable, de lutte contre lâalcoolisme, il laisse intacte la question des autres alcools importĂ©s (whisky, vins, biĂšres...) qui sont pourtant de loin les plus consommĂ©s par les RĂ©unionnais", a-t-elle dĂ©noncĂ©.Â
Pour la RĂ©gion, cette hausse de la fiscalitĂ©, "dĂ©cidĂ©e sans aucune concertation avec les acteurs de la filiĂšre, fragiliserait fortement des entreprises rĂ©unionnaises qui crĂ©ent des emplois (1.200 emplois directs Ă ce jour) et valorisent un savoir-faire reconnu Ă lâinternational, sans aucun bĂ©nĂ©fice sanitaire dĂ©montrĂ©".Â
"Lâaugmentation inĂ©vitable du prix du rhum produit localement entraĂźnerait, Ă La RĂ©union, des pertes de parts de marchĂ© au profit des alcools importĂ©s et aurait Ă©galement des rĂ©percussions sur la capacitĂ© de la filiĂšre Ă exporter ses produits, notamment dans lâHexagone", a-t-elle estimĂ©.Â
MĂȘme son de cloche du cĂŽtĂ© d'Evelyne CorbiĂšre Naminzo : "l'effet sanitaire supposĂ©ment bĂ©nĂ©fique de cet amendement est trĂšs loin dâĂȘtre dĂ©montrĂ©, puisquâil concerne la filiĂšre "rhums" locale, sans sâattaquer aux autres alcools importĂ©s.Â
Si cet amendement "ne permettra pas de lutter sĂ©rieusement contre lâalcoolisme", il aura "en revanche des consĂ©quences dramatiques sur une filiĂšre dĂ©jĂ trĂšs fragilisĂ©e".Â
- Le docteur David Mété dénonce la position de la Région -
Un argumentaire qui a courroucĂ© le docteur David MĂ©tĂ©, chef du service addictologie du CHU de La RĂ©union, qui dĂ©nonce depuis plusieurs annĂ©es le manque d'encadrement autour de la filiĂšre rhum.Â
"La tribune de la prĂ©sidente de RĂ©gion est une navrante suite de contre-vĂ©ritĂ©s, manifestement rĂ©digĂ©e sous la dictĂ©e de nos industriels rhumiers péï. Elle mĂ©connaĂźt les notions les plus Ă©lĂ©mentaires de santĂ© publique", fustige-t-il ce vendredi.Â
La fiscalitĂ© actuelle sur les rhums et leurs dĂ©rivĂ©s, "câest un niveau dĂ©risoire de 38,11 euros lâhectolitre dâalcool pur contre 1 899,5 euros pour lâHexagone, soit tout de mĂȘme prĂšs de 50 fois moins !", dĂ©nonce-t-il.Â
Il rappelle que "lâorganisation mondiale de la santĂ© (OMS) nous prĂ©cise que la fiscalitĂ© sur lâalcool est le meilleur outil de lutte contre lâalcoolisme". Pour le docteur David MĂ©tĂ©, "lâadoption de lâamendement du Dr StĂ©phane Fouassin permettrait, en utilisant une projection des Ă©tudes internationales, de sauver prĂšs de 50 vies par an".Â
"Nâen dĂ©plaise Ă madame Bello, on consomme deux fois plus dâalcools forts ici et ces alcools forts sont majoritairement des produits locaux issus de la canne, vendus Ă bas prix grĂące Ă une fiscalitĂ© complaisante et trĂšs largement diffusĂ©s grĂące Ă un extraordinaire rĂ©seau de distribution", lance l'addictologue.Â
"Ce nâest pas une chance dâavoir la dose dâalcool la moins chĂšre de France pour La RĂ©union avec les autres DROM : câest une inĂ©galitĂ© majeure de santĂ© publique."
- 250 décÚs directs et 450 indirects à cause de l'alcool chaque année à La Réunion -
Ce dĂ©bat intervient alors que l'alcoolisme Ă La RĂ©union tue en moyenne 250 personnes chaque annĂ©e. "On estime Ă 250 le nombre de dĂ©cĂšs par an liĂ©s directement Ă lâalcool (cause directe) et plus de 450 dĂ©cĂšs au moins en partie imputables Ă lâalcool", indiquait l'Agence rĂ©gionale de santĂ© (ARS) en juin dernier.Â
Si le dĂ©partement est derriĂšre l'Hexagone en termes de consommation quotidienne d'alcool, 10 % des buveurs consomment 69 % des quantitĂ©s dâalcool bues Ă La RĂ©union. Les gros buveurs peuvent consommer jusqu'Ă 16 verres par jour, soit trois litres d'alcool fort. Soit une moyenne de 112 verres par semaine.
D'aprĂšs une enquĂȘte d'Alcoolisation Chronique Massive Ă La RĂ©union (ACMA974), l'alcool le plus consommĂ© reste par ailleurs le rhum et ses dĂ©rivĂ©s pour 47% des personnes.
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Pour les personnes ayant une forte dĂ©pendance Ă lâalcool, il est conseillĂ© dâen parler Ă son mĂ©decin et dâaller consulter des professionnels spĂ©cialisĂ©s en addictologie : CSAPA (centre de soins ambulatoires en addictologie) ou services dâaddictologie des Ă©tablissements de santĂ©.Â
La direction d'Addictions France RĂ©union accueille les personnes sur son centre de prĂ©vention et de formation sur les addictions, ainsi que sur ses centres de soins en addictologie repartis sur lâensemble de lâĂźle. Toute personne peut se faire accompagner de maniĂšre anonyme et totalement gratuite. Renseignements Ă la direction dâAddictions France au : 02 62 30 22 93 ou sur le site de lâassociation nationale : https://addictions-france.org/
Pour faire le point sur sa consommation dâalcool, sâinformer ou ĂȘtre aidĂ©, RDV sur le site "Alcool-info-service".
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P0lutĂŽt d'accord avec le docteur MĂ©tĂ©, malgrĂ© quelques excĂšs verbaux. Il faut bien commencer par un bout, l'alcoolisme est un vrai flĂ©au! Et effectivement, taxer fait baisser la consommation... Ce qui ne m'empĂȘchera nullement de me confectionner mes rhums arrangĂ©s pĂ©i!
700 morts par an et les alcooliers parle eux de1200 emplois sur plusieurs annĂ©es .le fric avant la vie. Le Dr MĂ©tĂ© ( un des rares qui mĂ©rite sa lĂ©gion dâhonneur) est muselĂ© par les politiques prĂȘt Ă tout pour sauver leurs tĂȘtes . Lâaugmentation du prix du tabac a permis de faire reculer le tabagisme chez les jeunes