La polémique enfle depuis une semaine autour d'un amendement déposé par le sénateur Stéphane Fouassin, visant à renforcer la taxation des alcools forts. Si l'amendement n'a pas été adopté, faute de vote autour du budget 2026, les attaques par communiqués de presse interposés continuent. Et font passer au second plan un fléau pourtant bien réel pour La Réunion : la consommation d'alcool (Photo : rb/www.imazpress.com)
Ce qui est une question de santé publique est en train de tourner à la bataille politique – et polémique.
Et pourtant, la question est centrale pour La Réunion, alors que l'alcool y fait des ravages. Sur la santé, dans les foyers, sur les routes… Si le département est derrière l'Hexagone en termes de consommation quotidienne d'alcool, 10 % des buveurs consomment 69 % des quantités d’alcool bues à La Réunion.
Les gros buveurs peuvent consommer jusqu'à 16 verres par jour, soit trois litres d'alcool fort. Soit une moyenne de 112 verres par semaine.
- À La Réunion, l'alcool tue -
L'alcool est omniprésent dans les affaires de violences, notamment intrafamiliales. En 2024, la préfecture de La Réunion notait à l'occasion de son bilan annuel sur la sécurité que "la consommation d’alcool est quasiment systématiquement présente pour les faits de violences au sein du cercle familial"
Un fait qui n'est pas anodin, alors que La Réunion s'est tristement positionnée en deuxième position des départements comptabilisant le plus de violences conjugales et sexuelles en France en 2024, et où 70% des violences concernent des violences intrafamiliales.
L'alcool fait aussi des ravages sur la route. Selon le dernier bilan routier réalisé par les autorités, l'alcool représente 21% des causes d'accidentalité depuis le début de l'année. 40 personnes ont perdu la vie sur les routes en 2025.
Par ailleurs, à La Réunion, un enfant porteur de troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale naît tous les deux jours.
Enfin, l'alcoolisme à La Réunion tue en moyenne 250 personnes chaque année. "On estime à 250 le nombre de décès par an liés directement à l’alcool (cause directe) et plus de 450 décès au moins en partie imputables à l’alcool", indiquait l'Agence régionale de santé (ARS) en juin dernier.
Tout cela alors que l'alcool le plus consommé reste par ailleurs le rhum et ses dérivés pour 47% des personnes.
Dans ce contexte, il semble légitime de continuer à renforcer les dispositifs autour de la consommation d'alcool. Notamment quand on note toutes les difficultés déjà présentes pour faire respecter les lois en vigueur, notamment en termes de publicité.
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- Une polémique qui efface la problématique -
Le débat a largement dépassé l'amendement déposé par Stéphane Fouassin. Le sénateur qui regrette d'ailleurs que "les rhumiers qui s'offusquent n'ont pas dû lire l'amendement, qui protégeait les filières locales puisqu'il y prévoyait des négociations avec les rhumiers".
"Il pourrait y avoir une taxation par rapport à l'alcool importé, et une modération sur la filière locale", avance-t-il, précisant que "les bières et les vins ne sont pas concernés par l'amendement".
C'est d'ailleurs tout le nerf de cette guerre entre la Région et l'addictologue David Mété : la protection de la filière locale.
Si Huguette Bello a jugé "louable" la lutte contre l'alcoolisme, elle estime que "cette hausse de la fiscalité, décidée sans aucune concertation avec les acteurs de la filière, fragiliserait fortement des entreprises réunionnaises qui créent des emplois (1.200 emplois directs à ce jour) et valorisent un savoir-faire reconnu à l’international, sans aucun bénéfice sanitaire démontré".
Des arguments portés par les acteurs de la filière, mais aussi par la sénatrice Evelyne Corbière Naminzo, qui a estimé que "cet amendement plonge la filière Rhums de La Réunion, composée uniquement de TPE et PME locales, dans une lourde insécurité économique".
Il n'en aura pas fallu plus pour le docteur David Mété, intervenant régulier dans les médias, pour s'attaquer à ces prises de position avec la fougue qui est la sienne. Un ton qui avait peu de chance de plaire à la Région, et qui a finalement éclipsé le sujet principal : les ravages de l'alcool.
Docteur dont le CHU de La Réunion - où Huguette Bello est présidente du conseil de surveillance - s'est désolidarisé, indiquant "ne s’associe(r) en aucune manière aux propos exprimés, tant sur la forme que sur le fond". Quand bien même le docteur David Mété s'est exprimé en sa qualité de président de la Fédération Régionale d'Addictologie de La Réunion (FRAR) et non en tant que chef du service d'addictologie.
- Un amendement qui avait vocation de prévention, mais ne passera pas, faute de budget -
"Mon objectif, c'est de lutter contre l'alcoolisme et pouvoir avoir moins d'accidents, moins d'enfants touchés par l'alcoolisation fœtale", note Stéphane Fouassin, médecin de formation. Il proposait que les bénéfices tirés de cette hausse soient reversés au Département, car il "est responsable de tout ce qui est alcool et tabac en termes de prévention".
"La lutte contre les addictions, dont l’alcoolisme, relève en premier lieu des compétences de l’État, notamment en matière de santé publique et de prise en charge médicale", rappelle de son côté le Département.
Pour autant, le Département de La Réunion "s’inscrit dans une démarche volontariste et complémentaire, en menant des actions de prévention ciblées, en particulier auprès des jeunes publics et des familles".
"Il n’existe pas de budget spécifique et récurrent exclusivement dédié à la lutte contre l’alcoolisme, mais plusieurs actions concrètes sont déployées chaque année", précise-t-il.
"Plus largement, au-delà de la prévention, le Département agit sur les conséquences sociales du fléau de l’alcool, notamment à travers : la lutte contre les violences intrafamiliales, les dispositifs d’hébergement d’urgence, le financement de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), le soutien à l’entrée en autonomie précoce, à un niveau supérieur à la moyenne nationale, la création et la gestion de structures d’hébergement relevant des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS)", liste la collectivité.
L’ensemble de ces actions "représente chaque année des dizaines de millions d’euros de mobilisation financière" pour le Conseil départemental.
Dans tous les cas, l'amendement en l'état ne passera pas cette année.
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Pour les personnes ayant une forte dépendance à l’alcool, il est conseillé d’en parler à son médecin et d’aller consulter des professionnels spécialisés en addictologie : CSAPA (centre de soins ambulatoires en addictologie) ou services d’addictologie des établissements de santé.
La direction d'Addictions France Réunion accueille les personnes sur son centre de prévention et de formation sur les addictions, ainsi que sur ses centres de soins en addictologie repartis sur l’ensemble de l’île. Toute personne peut se faire accompagner de manière anonyme et totalement gratuite. Renseignements à la direction d’Addictions France au : 02 62 30 22 93 ou sur le site de l’association nationale : https://addictions-france.org/
Pour faire le point sur sa consommation d’alcool, s’informer ou être aidé, RDV sur le site "Alcool-info-service".
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On n'a jamais compris ce que Fouassin fait en politique.
Pas sur que lui meme connaît la réponse.
En métropole ils ont Brigitte bardot.
A la Reunion on a Meité